Qu’est-ce que la psychogénéalogie ?

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Avant d’aborder l’étude de la psychogénéalogie, il convient d’en définir les origines, de suivre son évolution et d’examiner les perspectives qu’elle offre.

L’approche psychogénéalogique — fondée sur la constatation selon laquelle nos destinées sont en partie déterminées par l’histoire et la psychologie des générations qui nous précèdent — est très ancienne et universelle, puisque l’on peut faire des recoupements avec des traditions ancestrales telles que la médecine chinoise, ou encore avec différentes formes de chamanisme.

Dans notre civilisation judéo-chrétienne on retrouve couramment cette notion de transmission transgénérationnelle, où il est énoncé à maintes reprises que les fautes des pères se répercutent sur plusieurs générations (généralement trois ou quatre). La Bible ne dit-elle pas que « Les pères ont mangé des raisins verts et les dents des enfants en sont agacées » ?

Force est de constater, par ailleurs, que notre culture occidentale a eu tendance à se couper de ses ancêtres, notamment depuis le début du XXe siècle, ce phénomène s’étant accru au fil des générations en raison notamment du déracinement lié à la révolution industrielle et de l’éclatement de la famille traditionnelle.

De ce fait, alors que des individus vivant au sein d’une même communauté villageoise restaient tout naturellement en contact avec l’histoire de leurs ancêtres et que les secrets de famille étaient difficilement gardés du fait de la communication au sein du groupe — une telle transmission s’avère des plus aléatoires dans notre société au sein de laquelle les membres d’une même famille sont disséminés aux quatre points cardinaux et dont la structure se limite à la famille mononucléaire.

L’engouement pour l’étude de la généalogie, ou de la psychogénéalogie, découle de la perte de sens vécue par des individus coupés de leur famille et de leurs racines et qui aspirent à retrouver le fil de leur propre histoire en passant par celle de leurs aïeux.

Nous nous devons tout d’abord de souligner l’apport incontournable du Professeur Anne Ancelin-Schutzenberger — psychologue clinicienne, docteur en psychologie, chercheur et professeur à l’université de Nice — qui fait figure de précurseur dans l’exploration de la psychogénéalogie.

C’est à partir de sa pratique clinique qu’Anne Ancelin-Schutzenberger a introduit la dimension transgénérationnelle, ou psychogénéalogie, par le biais de ce qu’elle appelle le « syndrome anniversaire ».

Dans son livre devenu désormais un classique : « Aïe ! mes aïeux ! »*, elle décrit des trajectoires émaillées de troublantes répétitions qui s’étendent parfois sur plusieurs générations. Citons l’exemple de cette famille dans laquelle, sur plusieurs générations, les garçons ratent leur bac. Après étude psychogénéalogique il apparaît qu’un grand’père fut chassé de chez ses parents à la veille de passer son bac, parce qu’il avait mis une bonne enceinte. On peut parler là d’une sorte de malédiction familiale à déjouer.

L’apport clinique d’Anne Ancelin-Schutzenberger porte surtout sur les causes de maladies graves telles que le cancer, dont elle a étudié l’origine transgénérationnelle avec son mari, médecin chercheur à l’INSERM, ouvrant ainsi la voie à une discipline nouvelle : la psycho-bio-généalogie.

Le premier cas ayant ouvert ce champ de recherche est celui d’une jeune femme de trente-cinq ans, atteinte d’un cancer en phase terminale, et dont la mère était elle-même morte à trente-cinq ans. Cette constatation clinique permit au Professeur Anne Ancelin-Schutzenberger d’élaborer les notions de syndrome anniversaire et de loyautés familiales invisibles.

Anne Ancelin-Schutzenberger a également mis l’accent sur les difficultés psycho-sociales rencontrées par ses patients : échecs, accidents de vie, faillites, etc. … Ce type d’événements constituera la base de notre étude.

Depuis les travaux de cette pionnière, on assiste à une abondance de recherches et à l’apparition d’écoles très diverses. Parmi elles je citerai les travaux de Claude Sabbah, de Didier Dumas et de Salomon Sellam, dont s’inspirent ma recherche et ma pratique.

Pour conclure cette présentation de la psychogénéalogie, je dirai qu’elle apporte un éclairage ciblé et pertinent — évitant bien des détours — lorsqu’il s’agit de résoudre des difficultés existentielles, tant personnelles que professionnelles.

Je qualifierai cette approche de « chemin direct » menant au cœur de la problématique, tandis que d’autres s’avèrent être des voies sinueuses et semées d’embûches.

C’est cette approche directe, donnant lieu à des prises de conscience et, très souvent, au dénouement de mécanismes dérivant de fidélités familiales inconscientes, que je privilégie, notamment en ce qui concerne la relation à l’argent et la réussite.

M.-N. Maston

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* Desclée de Brouwer, 1998.

Publié dans Les Bases

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